Passons à présent à 3 Days Of
Silence et à son premier album Sodium/Sulphur. D’abord sur la forme il faut
dire que cet album se trouve soit en vinyle couleur blanc, soit en cassette
audio (blanche elle aussi ou grise). Musicalement il y a une première partie ou
face A qui est caractérisée par un son plus électro et une deuxième partie ou
face B où le côté black metal est très marqué. On voit donc que le support
(vinyle ou K7) a été choisi en fonction de l’album pour marquer de façon claire
cette dualité qui est présente d’ailleurs dans le titre qui lui aussi est
double Sodium/Sulphur. Est-ce que tu peux nous en dire plus sur l’idée qu’il y
a derrière à tout ceci ? Est-ce que on peut considérer Sodium/Sulphur
comme un concept album ?
Oui, je
pense qu’on peut parler de ‘concept’. Le maître-mot de ce projet est ‘spontanéité’.
Il se trouve que les deux personnes qui composent au sein de 3 DoS ont des
parcours très différents. Tom vient du metal et notamment du thrash, alors que
Faex a un background electro. Logiquement, cela influence leur travail de
compo. Très tôt, on s’est retrouvé avec des titres qui partaient dans deux
directions très distinctes, l’une effectivement très froide et hypnotique,
laissant une large place aux éléments electro et l’autre, plus bestiale et rageuse.
Mes premiers textes pour cet album remontent à 2010, donc bien avant la
création de 3 DoS. Mais on y trouvait également une sorte de jeu d’oppositions,
certains froids et cyniques, d’autres bestiaux et violents. Plutôt que de
devoir choisir une direction plutôt que l’autre, nous avons décidé d’explorer
plus avant cette opposition. Le choix d’un support tel que le vinyl s’imposait
dès lors de lui-même. Pour tenter de résumer, ‘Sodium’, c’est l’isolement en son
monde intérieur, le repli sur soi, le constat de sa propre mortalité, de sa
fragilité. ‘Sulfur’, c’est l’isolement dans un monde surpeuplé, le constat que
l’homme a beau s’organiser en sociétés complexes, il reste un animal aux instincts
primaires, un prédateur.
Le vinyle blanc est vraiment
superbe, une jolie couleur, un très bon rendu sonore et un joli layout. Peux-tu
nous dire qui s’est occupés de cette réalisation ? Est-ce que le vinyle a
été pressé en Europe de l’Est ? Je sais que plusieurs labels et artistes font
presser leurs vinyle en Pologne ou en Roumanie.
L’artwork
a été réalisé par Slo du groupe français Smohalla. On voulait quelque chose de
très sobre, qui résume la froideur de nos compos. J’aime beaucoup le résultat.
Quant au pressage, il a été effectué chez GZ-Media, en République tchèque. A ma
connaissance, il s’agit de la plus grosse boîte sur ce créneau en Europe.
3 Days Of Silence est un groupe
mais il fonctionne aussi comme un laboratoire d’idées d’où la présence de
plusieurs invités sur cette album. Est-ce que tu peux nous parler de la
philosophie à la base de ce laboratoire ? Peux-tu nous présenter ceux qui
ont participé avec vous ? Comment avez-vous choisi ces invités ?
La
philosophie était simplement de se dire : si un mec peut apporter un plus
à cet album, pourquoi s’en priver en voulant à tout prix respecter un format de
‘groupe’. Nous sommes tous les trois des musiciens relativement expérimentés,
mais nous sommes forcément limités par nos propres capacités, notre spectre d’influences,
nos goûts musicaux. Aort des groupes anglais Code et Blutvial a ainsi apporté
une couleur inattendue au titre S.W. MMVII avec son style de guitare unique et
toujours inspiré. Je suis capable de produire des screams aigus et dans les
mediums, mais je me sens un peu moins à l’aise dans les graves. Comme nous
voulions quelques vocaux death à l’occasion, nous avons fait appel à un vrai
spécialiste de ce style en la personne de Pat Bonvin, de Near Death Condition.
J’ai appris par hasard qu’il avait fait de nombreuses années dans un chœur. Je
lui ai donc demandé de poser quelques voix mélodiques également. A la base, il
devait intervenir uniquement sur ‘Na-tural S-tate’, mais il a entendu des
extraits de la face ‘Sodium’ et a tenu à y participer. D’où sa présence
également sur ‘Ask The Dust’. De même, j’étais un peu bloqué avec les voix de ‘S.W.
MMVII’. J’ai contacté John B. de Blutmond qui a accepté d’enregistrer quelques ‘vokills’
plutôt dérangeants. Vince, ex-Xicon et actuel Buried Skies, livre quant à lui
quelques voix mélodiques sur le titre ‘White Bird’. Nos groupes répètent dans
le même local, il était assez aisé de l’impliquer dans cet album. Enfin, ACid de
Dark Isle et Wulf Kloff a accepté de remixer ‘Mortality/Normality’, le
transformant en une pièce de trip hop glauque à souhait.
D’un côté tu faisais comprendre
tout à l’heure que 3 Days Of Silence est un groupe studio qui n’a pas forcement
vocation à tourner. Puisque l’album est sorti en 2013, est-ce que vous avez
commencé à penser à du nouvel matériel ?
On avance
très très lentement mais on y arrive. On a déjà deux titres plus ou moins prêts
et des ébauches pour six ou sept autres. Il s’agira d’un album concept qui vous
fera faire le tour du monde J. De ce que j’ai entendu jusqu’ici,
il sera davantage dans un esprit ambient, plus proche de ‘Sodium’ que de ‘Sulfur’
mais ça reste à confirmer. Notre guitariste est parti s’installer à Dubaï peut
avant la sortie de ‘Sodium/Sulfur’. On a tous bossé de notre côté sur 3 DoS,
mais la distance n’a pas aidé à rester très concentrés. D’autant que nous avons
tous beaucoup de boulot, de projets, des familles.
En
regardant sur internet je n’ai pas trouvé beaucoup de chroniques de
Sodium/Sulphur mais ce que j’ai lu était très enthousiaste. Comment tu perçois
l’influence et le rôle d’internet par rapport à 3 Days Of Silence ?
On ne cherche pas à tout prix à
récolter 2000 chroniques. Nous avons au contraire ciblé les sites et blogs qui
respectent le travail sur le support physique d’un album, comme le tien. ‘Sodium/Sulfur’
n’est pas juste une collection de titres mais un ‘album’ au sens qu’il avait
encore avant l’avènement du mp3. La musique en est un aspect, les texte un
autre, le support un troisième, etc. Je pense que beaucoup de rédacteurs l’ont
compris, à voir les excellentes chroniques que nous avons obtenues.
Diablerets est un duo formé par
toi (vocals, bass, FX, programming) et par Grant Hailey (bass, programming,
vocals, drums) qui comme toi es aussi dans le groupe Path Of Desolation.
Diablerets tire son nom du massif montagneux des Alpes bernoises, situé aux
confins des cantons de Vaud, du Valais et de Berne. Le nom Diablerets vient du
fait que selon plusieurs légendes ce massif est habité par des diablotins voir
le diable même. J’ai trouvé en ligne cette phrase «Le but de notre groupe est
de donner une voix aux démons oubliés» prononcée par Grant Hailey. Est-ce
que tu as envie de reprendre et de développer ce sujet ?
Quand
Grant m’a parlé de son projet drone, j’ai immédiatement dit : ‘Appelons-le
Diablerets !’ Ce nom me trottait dans la tête depuis un certain temps. Il
a quelque chose de ‘démoniaque’ ; en plus, mes ancêtres sont originaires
de la vallée des Ormonts, où se trouve le village des Diablerets. J’aime la
réaction que ce nom suscite par chez nous: pour les gens de la région,
c’est juste une petite station de ski familiale, alors ce nom les fait marrer,
ils croient à une plaisanterie… Mais cette région regorge de légendes
troublantes, matière parfaite pour un projet drone !
Diablerets évolue dans un
registre black metal / doom / drone et a sorti son premier album I en 2014 sous forme de cassette en
édition limitée à 75 exemplaires dans un boitier en carton. Deux questions
s’imposent, pourquoi 75 exemplaires et non 66 ?
Parce que
l’usine s’est plantée dans ma commande… J C’est véridique. En fait, on pensait en faire 70,
ça nous semblait raisonnable, compte tenu du public très restreint que nous
imaginions toucher. Mais on en a eu cinq gratos.
Le
boitier en carton a été découpé à la main, il y a eu des blessés ?
Haha.
Non, on a fait très attention. Mais c’est passé tout près, par moments. Et
Grant a eu toutes les peines du monde à comprendre comment couper ces satanées
pochettes. On s’est vu au pub pour le faire. Il doit en avoir fait quatre et
foiré deux, avant de se contenter de faire ce qu’il fait le mieux :
picoler.
Tu as dit plusieurs fois que
Diablerets est né par l’envie que toi et Grant aviez d’expérimenter et surtout
ce projet est né et semble évoluer autour de la bonne bière. Posé en ces
termes, on pourrait penser à quelque chose de léger ou de rigolo alors que à
l’écoute de l’album on est frappé par un côté extrême très poussé et recherché.
Je cite ma chronique : « L’ascension au massif de Diablerets est un paradoxe. D’un côté
il nous semble de monter vers l’absolu symbolisé par la montagne. De l’autre on
plonge dans les tréfonds de notre âme et on trouve une noirceur absolue.
Élévation d’un côté, dissolution de l’autre. Peut-être qu’il se trouve ici une
assonance avec le principe des alchimistes le « solve et coagula »
qui semble renfermer le secret du Grand Œuvre. Le terme « solve » est
parfois représenté par un signe qui montre le Ciel (on pourrait dire la
montagne), et le terme « coagula » par un signe qui montre la Terre
(notre intériorité) ». Est-ce que tu penses que cette analyse puisse être
juste ? Est-ce que vous, comme groupe, vous pensiez que l’on puisse
ressentir cette profondeur dans votre musique ?
On est
franchement étonnés et flattés des impressions que génère notre musique. J’ai
une vision un peu ambivalente de Diablerets. D’un côté, il s’agit clairement
d’un délire, d’un prétexte pour nous prendre des murges monumentales lorsque
nous bossons sur ce groupe. On a une manière assez simple de décrire le principe
de composition : on se pointe au local, on boit une bière, on improvise,
on réécoute, on trouve que c’est de la merde, on boit des litres de bières, on
improvise, on réécoute, on trouve ça génial, on boit encore, on réécoute le
lendemain avec la gueule de bois, on trouve que c’est de la merde, on file les
fichiers à Faex (de 3 DoS) qui passe des plombes à faire en sorte que ça sonne
génial. Diablerets lui doit énormément. Mais au-delà de cet aspect léger et
potache, je mets autant d’énergie et de passion dans ce projet que dans mes
autres ‘créations’. Diablerets est quelque chose de libérateur, à mes yeux. On
crache ce qu’on a dans les tripes, sans se poser trop de questions. Du coup,
même si c’est peut-être aller chercher loin, ta comparaison avec le principe
alchimique n’est pas forcément dénuée de sens. Enregistrer pour ce groupe,
c’est plonger dans les trucs qui nous minent au quotidien pour le dissoudre et
en ressortir une ‘matière’ contemplative.
Il me semble de voir que certains
titres reprennent des légendes liées aux Diablerets comme celle de la Quille du
Diable. Peux-tu nous dire quels titres reprennent ces légendes et quelles
légendes ?
La
montagne la Quille du Diable est ainsi nommée car les anciens prétendaient que
les démons jouaient aux quilles sur le glacier des Diablerets avec des rochers.
Lorsqu’ils manquaient leur cible, les pierres dévalaient les falaises et
détruisaient le village de Derborence, en contrebas. C’est d’elle dont parlent
les titres ‘Lurk In The Stones’ et ‘Diablerets’. ‘Holy Man’, notre hit-single,
s’inspire de la légende de la Cape au Moine, une montagne située sur l’autre
versant de la vallée. Elle raconte comment un vieux moine a été changé en
pierre en abritant deux pâtres sous son manteau pour les protéger d’un loup.
‘Casting Rubies to the Wolves’ se base sur la légende du Scex Rouge ou
‘montagne aux rubis’, voisine de la Quille du Diable. En cherchant une brebis,
une bergère aurait découvert une grotte, demeure d’un génie. Ce dernier lui fit
promettre de ne jamais révéler où se trouvait l’entrée de cette grotte. En
contrepartie, il offrit à notre bergère trois gros rubis. Elle doit avoir tenu
parole, car on n’a jamais retrouvé d’autres rubis dans la vallée. ‘Hauswirth’
est une petite incartade géographique puisqu’elle s’inspire d’un artiste de la
vallée voisine qu’on appelle Pays-d’Enhaut. Hans Jakob Hauswirth est un
personnage mystérieux que l’on considère aujourd’hui comme le père de l’art du
papier découpé, typique de cette région. Il a passé sa vie comme un reclus à
découper patiemment la vie de la région, avec ses ciseaux. Ses créations sont
magnifiques, pleine de vie, chargée de symboles. J’avais envie de rendre
hommage à cet homme qui a mené une existence difficile et qui n’a été reconnu
pour son art que bien des années après sa mort. Aujourd’hui, ses rares œuvres
coûtent des milliers d’euros et s’exposent aux quatre coins du monde, des USA
au Japon.
En 2015 Diablerets a sorti un
split sous forme de 45 tours avec le groupe Inner+Black. Vous avez réalisé un
titre chacun. Comment est née cette collaboration ? Peux-tu nous en dire
un peu plus sur Inner+Black puisque sur internet on ne trouve pas grand-chose.
Est-ce un groupe ? Est-ce un one-man-band ?
Ils sont
deux, comme nous. Je crois qu’ils sont recherchés pour avoir pratiqué des
cultes pas catholiques avec de jeunes vierges ou alors pour incendie d’église
et terrorisme musical. Je ne peux donc pas trop t’en révéler à leur sujet, sans
les mettre en danger. Ils sont basés à Genève, à moins que ce ne soit juste un
moyen d’échapper au fisc norvégien, la Suisse restant un paradis fiscal, comme
vous, chers voisins français, nous le rappelez à tout bout de champ. Je connais
l’un des membres depuis de nombreuses années. Il m’a fait écouter Inner+Black
et j’ai dû sortir de la pièce en courant pour vomir et me faire exorciser. On
lui a filé un titre de Diablerets en retour, ça lui a fait un peu peur… On a
décidé de bosser ensemble.
Avec le choix d’une cassette et
d’un vinyle, tu vas à contrecourant. Est-ce que c’est un choix fait pour
privilégier l’album en tant que tel comme on faisait auparavant, avant la
sortie des mp3 ?
Grant et
moi sommes des grands mordus de cassettes. On achète plein d’éditions limitées
débiles. Du coup, avant même que la première note de ‘I’ ne soit enregistrée,
il était clair que cet album allait sortir en cassette. Je ne suis pas fan de
mp3. J’ai besoin d’avoir quelque chose dans les mains (n’y vois pas de
sous-entendu pervers) quand j’écoute un album. Pour moi, écouter un mp3, c’est
comme regarder une photo d’un beau tableau. Je préfère aller au musée.
Quel retour as-tu par rapport à
Diablerets ? C’est un concept tellement extrême que ça doit plaire ou
déplaire, en tout cas ça ne laisse pas indiffèrent !
Le
batteur de Path déteste ;-) Les retours des reviews sont tous
excellents et j’en suis flatté. Dans notre entourage, ça balance entre ceux qui
pensent que c’est de la merde et ceux qui trouvent ça génial, dont Faex qui
reste notre fan numéro 1. On a fait écouter ça aux mecs de Path et ils
trouvaient ça un peu débile au début mais certains d’entre eux sont venus à nos
répétitions et se sont pris au jeu. Deux d’entre eux sont même venus nous voir
en concert ! La limite entre merde et chef-d’œuvre est souvent extrêmement
fine et on réussit l’exploit d’être pile poil dessus. Je ne crois pas qu’il
faille écouter ça comme de la musique. C’est une sorte de bande son de film
intérieur. Un ami a bien résumé la situation : ‘C’est pas mal, mais je
n’écouterais pas ça en allant acheter mes carottes au supermarché’. Je l’ai
fait et c’est vrai que ce n’est pas top pour te plonger dans l’ambiance de ‘I’.
Est-ce que il y a des plans dans
le futur pour Diablerets ?
On vient
de donner un concert très spécial, le soir d’Halloween. On a composé une
bande-son pour ‘Orlacs Hände’, film muet de 1924. On l’a jouée live dans un
cinéma magnifique, pendant la projection du film. C’était une expérience
incroyable (et passablement alcoolisée). J’aimerais vraiment remettre ça avec
d’autres films l’an prochain. Diablerets est le seul de mes projets qui me
laisse cette liberté. A part ça, il y aura un autre album, sans doute en 2016.
Le concept est là : les notions de géographie et d’histoire y seront à
nouveau centrales. Diablerets n’est pas l’inventeur du ‘Geographical doom’ pour
rien !! Mais avant cet album, nous allons nous concentrer sur le premier
Path Of Desolation. Une fois ce disque en boîte, je pourrai enfin avancer sur
Confinement, mon projet trip hop. Nous préparons un album. Je suis vraiment
fier des premières ébauches. Ce disque s’annonce très sympa. Je cherche un
chanteur ou une chanteuse, si tu connais quelqu’un de motivé. Grant et moi
allons également prendre un peu de temps pour bosser sur le projet black que j’évoquais
en début d’interview. L’idée est de l’enregistrer en même temps que le 2e
album de 3 Days Of Silence, sans doute fin 2016. Et Grant doit aussi enregistrer
des voix pour un mini avec un groupe de brutal death qui s’annonce de toute
bonne qualité On devrait arriver à caser quelques sessions Diablerets au milieu
de tout ça. Ça me démange, en tout cas.
Tu es chanteur depuis 1998 selon
mes sources et aussi artiste à part entière par rapport à ce que tu fais dans
tes différents groupes. Est-ce que le fait de jouer dans plusieurs groupes est
une façon pour toi de découvrir toujours de nouvelles choses ? De te
mettre toujours en jeu ? D’évoluer toujours ?
J’ai
longtemps évolué dans un seul groupe à la fois. Aujourd’hui, je suis actif dans
quatre ou cinq projets différents. Ce qui a changé ? J’ai vieilli… Je n’ai
plus trop d’ambitions musicales si ce n’est de m’amuser. J’écoute des choses
très variées et j’ai envie d’expérimenter dans ces domaines musicaux qui me
plaisent. J’essaie toujours d’avoir une approche nouvelle des textes et du
chant pour chaque projet. Chacun est un terrain de jeu qui me permet de
développer un peu mon chant. Je ne pense pas que Path sonnerait de la sorte,
sans le travail que j’ai dû fournir pour 3 DoS. Et je pense que les screams que
j’ai développé pour Diablerets impacteront mon chant dans 3 DoS, etc.
Tu as vécu comme artiste le
passage au numérique c'est-à-dire internet, la dématérialisation du support et
donc la naissance du mp3, des réseaux sociaux et en même temps on a aussi de
plus en plus la possibilité de créer son propre studio d’enregistrement et les
artistes ne sont pas obligés de répéter ensemble mais ils peuvent s’envoyer des
fichiers et faire des albums même sans se voir. Quel est ton ressenti par
rapport à tout ceci ?
Comme je
le disais, je suis fan du support physique, c’est quelque chose de primordial à
mes yeux. J’ai connu l’époque du tape trading et des affiches de concerts
photocopiées en noir-blanc avec une qualité épouvantable et qu’il fallait aller
coller dans tous les bars de la région pour ramener 10 pelés à ton gig. Je suis
nostalgique de cette période. Mais c’est vrai que les nouvelles technologies simplifient
la donne pour les musiciens et c’est une bonne chose. Il est plus facile
d’enregistrer ses titres décemment, de lancer des collaborations
internationales. Un des albums qui m’a le plus marqué ces dernières années est
celui de Lethe, un duo formé par Tor-Helge Skei de Manes (Norvège) et Anna
Murphy d’Eluveitie. Un tel projet n’aurait jamais pu voir le jour il y a 20
ans.
La scène helvétique est assez
vaste et parmi les groupes ont peux citer Celtic Frost, Coroner, Darkspace,
Triptycon, Sybreed, Eluveitie, Samael, Krokus, Shakra. Moi j’avoue avoir un
faible pour Pertness. Quels sont à ton avis les groupes même underground sur
lesquels il faudrait jeter une oreille ? Comment juges-tu la scène
helvétique ? Est-ce qu’il y a une solidarité entre les groupes ?
Je ne
connais pas Pertness mais je vais y jeter une oreille. C’est une petite scène
mais je trouve qu’elle grouille de personnes de talent. Je suis un immense fan
de Coroner, du Frost et plus encore de Triptykon. Les mecs de Sybreed et
Eluveitie sont des postes et j’aime leur travail. Quant à Samael, Vorph a
beaucoup influencé mon chant au départ. C’est un tout grand groupe et Xy est un
mec en or et ultra-talentueux. Ces formations donnent des idées à toute une
scène très dynamique… Je te recommande Blutmond, Nucleus Torn, Zatokrev,
Störtregn, Pÿlon, Absorbed, Euclidean… Il y en a tellement ! Je constate,
en discutant avec des musiciens d’autres pays, que notre scène jouit d’une
belle cote à l’étranger. Je ne sais pas si on peut parler de solidarité. Je
connais personnellement tous les groupes que je viens de citer et on se
respecte beaucoup. Comme partout ailleurs, il y a des affinités, des mecs avec
qui le courant passe mieux qu’avec d’autres. Il y a quelques mecs qui tournent
bien mais qui gardent les pieds sur terre et il y en a d’autres qui ne
t’adressent la parole que si tu peux éventuellement les aider à conquérir le
monde de la musique. Le seul souci est que notre scène est complètement
submergée par le metalcore… Tous ces guignols qui font le même style, ont le
même attirail de scène, bougent de la même manière en concert et on a
l’impression d’être la dernière ‘hype’ ! Tu as remarqué qu’ils ont tous un
verbe conjugué dans le nom de leur groupe ? ;-) Mais bon, on a déjà établi que j’étais un vieux
con.
Je pense que l’on a bien discuté
et je te remercie infiniment du temps que tu nous as consacré. Je te laisse le
mot de la fin pour nos lecteurs !
Merci
beaucoup pour cette interview recherchée. Je me réjouis de te présenter le
nouveau Path et le 2e 3 Days. Je te remercie pour ton travail et ton
amour des supports physiques ! Longue vie à Metallifer !